On décrit la région comme un véritable four où les températures peuvent monter à plus de quarante degrés, une zone à l'aridité impitoyable, et évidemment j'émerge de ma tente sous une pluie battante qui est tombée la nuit durant, détrempant jusqu'à mon sac de couchage, et la température atteint la formidable valeur de 18 degrés. Comme zone aride, j'ai connu mieux. Nous battons en retraite dans le véhicule et partons dans l'espoir d'atteindre Broken Hill, à plus de 400 kilomètres de là, pour y passer le 25 décembre, mais en ce qui nous concerne il n'y aura pas de miracle de Noël, et nos déboires vont atteindre un niveau de surréalisme rarement atteint - même par moi, ce qui n'est pas peu dire.
Après avoir roulé près de 150 kilomètres sous une pluie qui diminue à peine, en zigzagant pour éviter les kangourous suicidaires qui attendent de se faire écraser sur le bitume, la seule station d'essence sur la route de Broken Hill s'avère fermée, et ce qui nous reste dans le réservoir ne nous permet même pas d'atteindre Wilcannia, la prochaine ville. Patrice se résigne à arrêter une voiture, et le chauffeur consent à nous vendre assez d'essence pour atteindre les prochaines stations.
Ah ouais... Quand même...
On nous avait fortement conseillé de traverser Wilcannia pied au plancher, les quelques 80% d'aborigènes peuplant cette bourgade de 600 habitants ayant la biture comme activité favorite, et au vu de ce triste alignement de baraques poussiéreuses désertées de toutes activités en ce 25 décembre, on peut les comprendre. Malheureusement pour nous, les stations d'essences sont aussi abandonnées que ce déprimant patelin, et ce jusqu'au lendemain matin - si les pancartes affichées disent vrai...
Nous allons donc chercher sans succès une solution pendant des heures (retombant brièvement en panne par la même occasion), allant jusqu'à nous adresser à la police, à l'hôpital, et jusqu'aux pompiers en train d'éteindre une camionnette ayant pris feu en plein champ...
Mais autant essayer de s'échapper d'un trou noir; un phénomène gravitationnel inconnu nous fait tourner en rond, en long, en large et en ridicule, et au fil du temps qui se dilate jusqu'à être interminable il nous paraît clair que nous allons devoir passer le jour de Noël dans cet épouvantable ville fantôme.
Nous quadrillons le bled inlassablement, à la quête d'une opportunité, à tel point que je me demande si Wilcannia n'est pas en fait mon Brigadoon, duquel nous n'émergerons pas avant cent ans, devenus à notre tour à moitié fous par la dépression Finalement nous nous résignons à notre triste sort et allons échouer dans le Caravan Park désert - si ce n'est une famille disparate aux gueules patibulaires ayant transformé sa parcelle en camp de réfugiés roumains - , un camping ressemblant à s'y méprendre à un terrain vague laissé à l'abandon, jonché de feuilles mortes et de crottes de kangourous, en bordure d'une rivière glauque aux eaux dormantes infestée de mouches; un vrai régal pour l’œil.
Seul le responsable du camp égaie un peu le paysage, avec son chat, son émeu apprivoisé et son bébé kangourou orphelin recueilli à peine quelques heures plus tôt.
Nous passons la soirée à entretenir un feu alimenté par des branches mortes et des feuilles sèches, tout en vidant méthodiquement la glacière (dont les glaçons ont fondu depuis longtemps) de son contenu alcoolisé jusqu'à tard dans la nuit, alors que la police vient remettre à l'ordre l'ado de la famille d'à côté, qui a pété un câble en têtant un peu trop la bouteille et se promène dans le camping en hurlant des "motherfucker" à tue-tête.
Il semblerait que le seul moyen de supporter cet endroit est effectivement de se réfugier dans le coma éthylique...
Oh ! Comme il est beau ton Noyel en Australie !
RépondreSupprimerTon joyeux témoignage nous manquait pour nous décider à visiter ce beau pays.
Puisque ce Noyel n'est plus... Bonne Année ! Ah ? C'est pas l'heure ?
Bises aux 3 aventuriers !
Et pas même d'église pour la messe de minuit ! Ou la vidéo du Père Noël est une ordure. Biz à tous trois.
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