Non, bula n'est pas un cri de guerre, même si les plus cinéphiles d'entre vous auront peut-être remarqué que le titre parodie allègrement celui d'un film de guerre des années 70 (Tora!Tora!Tora!); c'est en fidjien le mot voulant dire à la fois bonjour et bienvenue, et que l'on entend 500 fois par jour minimum dès l'arrivée à l'aéroport, les fidjiens étant un peuple souriant et accueillant. D'un autre côté, quand on est un indigène insulaire découvert par une armada blanche maîtrisant la poudre à canon, il vaut mieux être très accueillant si on ne veut pas être massacré tout de suite, mais ceci est un autre débat.
Bref, après quatre heures et demie de vol depuis Sydney, j'arrive à l'aéroport international de Nadi, sur Viti Levu, la plus grande île de l'archipel (qui en compte quand même 332, dont 110 totalement inhabitées, et quelques-unes totalement privées). Je suis probablement le seul touriste à avoir jamais débarqué ici sans anti-moustique et sans linge de plage, mais je me suis décidé un peu vite et puis j'ai une réputation à tenir, comme arriver dans un endroit incongru au plus mauvais moment possible; par exemple un samedi soir, sachant que je ne pourrai rien organiser d'ici à lundi, tout étant fermé le dimanche.
Rester en ville étant donc inutile, je demande à un taxi de me déposer près d'une série d'hôtels bon marché en bordure de plage - qui n'est pas extraordinaire ici mais elle a le mérite d'exister. Je prends un lit en dortoir dans le premier établissement venu (trois fois moins cher qu'à Sydney) et après avoir traîné quelques heures au bord de l'océan, histoire de manger un sandwich et boire quelques bières aux prix ridicules, je retourne m'écrouler sur ma paillasse.
Avec le vacarme des trois ventilateurs qui tranchent du moustique en se balançant au plafond, et l'alternance moiteur/tempête quand le flux d'air arrive sur moi, je mets des heures à trouver le sommeil; et une fois enfin endormi, un sixième sens me réveille au moment précis où un cafard monumental remonte le matelas dans ma direction. Le bond instinctif qui me propulse hors du lit l'envoie valdinguer Dieu sait où, mais avec l'adrénaline à fond, je peux dire adieu à ma nuit de sommeil.
Premier coucher de soleil sur les îles Fidji
Le lendemain je change donc d'hôtel, car même si je suis habitué à partager ma chambre avec toutes sortes de cafards, j'apprécie assez peu qu'ils aient le toupet de dormir avec moi, surtout s'ils approchent le demi-kilo. Le dortoir est clair et propre, et je vois tout de suite que je n'aurai pas la même mésaventure ici; de plus le petit bar-restaurant donne directement sur la plage... Cependant j'aspire à plus de tranquillité et de meilleurs paysages; j'achète donc un billet de ferry pour le lendemain et une nuit d'hôtel quasiment à l'autre bout de l'archipel, sur l'île de Taveuni, qui de par son éloignement est paraît-il un peu moins touchée par le tourisme de masse.
Le ferry part de Suva, la plus grande ville du Pacifique Sud avec ses 170'000 habitants; un minibus d'une douzaine de jeunes routards nous fait traverser l’île de Nadi à Suva en quasiment quatre heures. Autant dire tout de suite que ce ferry n'a rien à voir avec ses homologues australiens. Ce tas de ferraille flottant est bien loin de ses jours de gloire, lorsqu'il appartenait au Canada. Récemment, Patrice m'a dit (sachant que mes standards de qualité sont assez bas lorsque je voyage): "Si toi tu trouves que ces toillettes ne sont pas propres, alors ça doit vraiment valoir le détour". Et bien là, précisément, elles valent carrément les 75 Dollars Fidjiens du billet...
Le port de Suva
Le voyage dure plus de 28 heures, et ce billet dans la classe la plus basse ne donne droit ni à une cabine ni à un siège inclinable, mais un simple siège à dossier droit; pour dormir, on s'allonge à même la moquette défraîchie. Heureusement, j'ai eu le temps d'acheter un linge de plage à Suva pour faire oreiller, et j'ai encore pas mal de pilules anti-mal de mer...
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